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11/11/2023

11 NOVEMBRE... 105 ans après l'hécatombe...

105 ans après l’hécatombe, l’Abattoir Général fume toujours… De part le monde, les mêmes bouchers saignent à blanc le même troupeau pour les mêmes raisons. Faute d’avoir été comprise, la leçon n’a toujours pas été retenue…

 

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Devant la crue de la Garonne " Que d'eau, que d'eau  !" constatait impuissant, le président Mac-Mahon. Parodiant ce dernier, "Que de sang, que de sang !" s'exclament, hypocrites, les fauteurs de guerre.

 

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« La guerre, c’est le massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent et ne se massacrent pas. » Paul Valéry

 

"Après un siècle de propagande, de mensonges et de lavage de cerveau à propos de la Première Guerre mondiale, la dissonance cognitive nous met bien trop mal à l’aise pour supporter cette vérité que c’est un petit groupe socialement privilégié de prétendus patriotes de race anglaise, financé par de puissants industriels et financiers britanniques et américains, qui a provoqué la Première Guerre mondiale. La détermination de cette Élite secrète londonienne à détruire l’Allemagne pour asseoir son contrôle sur le monde fut ultimement responsable de la mort d’honorables jeunes hommes, qui furent trahis et sacrifiés dans un massacre aussi sanglant qu’inutile, dédié à l’avancement d’une cause déshonorante. Dans les villages, villes et capitales du monde entier, des dizaines de milliers de monuments aux morts témoignent aujourd’hui de ce grand mensonge – de cette trahison – qui veut qu’ils soient morts pour « la plus grande gloire de Dieu » et pour que « nous soyons libres ». Ce mensonge les enchaîne à un mythe. Leur souvenir s’étire en une répétition de vains appels auxquels on procède pour dissimuler le véritable but de cette guerre. Ils ne méritent pas moins que la vérité, et nous leur devons de ne pas manquer à ce devoir là."  Les origines secrètes de la Première Guerre mondiale, Gerry Docherty & Jim MacGregor.

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« Nous marchions sur une terre calcinée, bouleversée, puante, semée de débris de fils de fer, de pieux brisés, de vêtements hachés et sanglants, de paquets de chair humaine… » Maurice Genevoix, Les Eparges

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"La grande différence entre les hommes et les rats, c’est que ces derniers ne se battent jamais que volontairement et par goût, tandis que je n’ai rencontré aucun homme qui fit la guerre pour son plaisir. Chacun d’eux paraissait céder à la nécessité, aussi bien parmi les agresseurs que chez les autres. Il faut donc supposer que ceux qui veulent la guerre ne sont pas ceux qui la font. Le chef d’œuvre de l’organisation consiste alors à faire accomplir par la collectivité ce à quoi chacun de ses membres en particulier répugne le plus."  Pierre Chaine, Les Mémoires d'un rat.

 

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« C’est des hommes et d’eux seulement qu’il faut avoir peur, toujours.

Combien de temps faudrait-il qu’il dure leur délire, pour qu’ils s’arrêtent épuisés enfin, ces monstres ? Combien de temps un accès comme celui-ci peut-il bien durer ? Des mois ? Des années ? Combien ? Peut-être jusqu’à la mort de tout le monde, de tous les fous ? Jusqu’au dernier ?... »  Louis Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit.

 

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« La grande défaite, en tout, c’est d’oublier, et surtout ce qui vous a fait crever, et de crever sans comprendre jamais jusqu’à quel point les hommes sont vaches. Quand on sera au bord du trou faudra pas faire les malins nous autres, mais faudra pas oublier non plus, faudra raconter tout sans changer un mot, de ce qu’on a vu de plus vicieux chez les hommes et puis poser sa chique et puis descendre. Ça suffit comme boulot pour une vie tout entière. » Louis Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit.

24/02/2012

24 FEVRIER 1885

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24 février 1885, naissance de l’écrivain et artiste polonais Stanislaw Ignacy WITKIEWICZ  dit WITKACY, à Zakopane, dans les Tatras.

Traduite en français par Alain Van CRUGTEN et par Gérard CONIO, l’œuvre romanesque et théâtrale disponible aux éditions de l’Age d’Homme, comprend quatre romans, deux essais et une trentaine de pièces de théâtre. 

Le premier des romans, du au talent de cet auteur hors du commun posté aux avant-gardes de la littérature de langue slave, a été écrit en 1910 mais n’a été publié qu’ en 1972, soit 33 ans après sa mort. Il s’agit d’une œuvre de jeunesse intitulée « Les 622 Chutes de Bungo », dans laquelle Witkacy décrit sa liaison avec une maîtresse « démoniaque », l’actrice Irena Solska, sur fond d’intrigues de cour où pavoisent dans la dérision, des personnalités connues de l’intelligentsia polonaise. Dérangeante, cette première œuvre l’était assurément puisqu’elle subit le veto paternel. N’importe, on n’arrête pas un fleuve au débit capable de porter les interrogations métaphysiques de Witkacy à des hauteurs et à des profondeurs que rien de ce qu’il écrira par la suite ne démentira.

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« L’Adieu à l’automne » paraît en 1927, « L’ Inassouvissement » en 1930. « L’Unique Issue », roman philosophique inachevé, est publié dans les années qui précèdent sa disparition en 1939. Hanté par l’idée de la mort consécutive au suicide de sa fiancée, Witkiewicz n’aura de cesse de traquer cette thématique et l’angoisse métaphysique inhérente à la néantisation ou à la survivance de l’Etre dans les questions d’ontologie générale qui jalonnent son œuvre. Nourri de philosophie allemande, rien d’étonnant à ce que l’auteur de « l’Unique Issue » ait condensé dans cet ultime ouvrage son explication du monde et la présence de l’Etre dans ce dernier. Le constat qu’il fait du déclin de l’Occident, qui ne s’inscrit cependant pas dans une perspective spenglérienne mais aboutit aux mêmes conclusions, ne laisse aucun doute quant au catastrophisme général qui guette les « sociétés évoluées » qui ont consommé la mort de Dieu. A plusieurs reprises il reprendra le thème de la décadence et de la prévarication des démocraties : « A mesure que la vie devient, grâce à l’évolution sociale, plus confortable, plus sûre dans ses traits, plus automatique et mécanique dans ses fonctions, il y a de moins en moins de place pour l’angoisse métaphysique dans l’âme humaine ». La réification des valeurs les ayant dépouillées de leur dimension transcendantale, rien d’étonnant, dès lors, à ce que le monde ne soit plus qu’une « représentation » grotesque vidée de son contenu, mécanisée à outrance et peuplée de mollusques décérébrés.

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Et Witkacy le décrit, ce monde, en utilisant sa plume comme une rapière trempée dans le vitriol. Il ferraille dru, dans l’exubérance d’un verbe truculent, burlesque à souhait, haut en couleurs, volontiers provocateur et outrancier selon, qui ne s’essouffle jamais et porte le lecteur « nom d’un chien ! » à ne plus jamais l’oublier après l’avoir lu. On ne sort plus tout à fait innocent de la lecture de Witkiewicz, comme aussi de celle de Ladislav KLIMA qui, je le confesse, m’a confirmé certains « pressentiments » perçus, mais en gestation chez Berkeley au sujet de la Grande Question qui  ne peut être que d’ordre ontologique. Witkiewicz, philosophe  « praticien » comme Klima, l’avait excellemment compris. Ce pourquoi tous deux furent mis au ban de la philosophie institutionnalisée ; le premier pour avoir flirté avec le solipsisme, le second, pour l’avoir vécu.

Il y a plus d’un point commun entre Witkiewicz de Klima. Si je les rapproche, c’est parce qu’ils n’ont pas ménagé leur « carcasse », expérimentant de la vie tout ce qu’ils pu dans l’excès comme dans l’ascèse. Sceptique « innassouvi », Genezip Kapen (je n’hésite qu’à peine), à la différence de Sider (désir) le héros de « Némésis la Glorieuse », ne brisera pas le miroir de la manifestation « qui n’est qu’une farce » dixit Klima . Il s’abandonnera à la folie au lieu que Sider, plongeant dans l’ abîme, conquerra l’immortalité.

Dans « Traités et diktats » Klima —qui ne s’est pas donné la mort— notait : « L’homme qui se respecte quitte la vie quand il veut ; les braves gens attendent tous, comme au bistrot, qu’on les mettent à la porte. » 

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Le 18 septembre 1939, C’est au tour de Witkacy de plonger dans l’abîme. Lui qui, sa vie durant s’était tenu au bord du gouffre (concept récurrent dans l’oeuvre: les précipices du mystère… les abîmes de l’Inconnu… les bords du précipice… le gouffre métaphysique… le trou sans fond… le gouffre soudain…) finira par y tomber en se saignant à blanc comme on saigne l’agneau, à l’orée d’un bois des environs de Jesiory, en Polésie après l’invasion de la Pologne par l’Allemagne et la Russie… Mort volontaire curieusement choisie trois jours avant l’automne à laquelle il avait dit adieu douze ans plus tôt. Suicide du philosophe parce que suicide de la philosophie ; effondrement des piliers supportant l’édifice social : les religions, l’art, la philosophie. Confrontation de l’être et de l’étant dans un combat de Titans perdu d’avance sur la mer déchaînée des passions exacerbées d’un siècle moribond.

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Peinture de Witkiewicz

Des trois phares qui éclairent la littérature polonaise des années 1920-1930, Schulz, Gombrowicz, Witkiewicz, c’est probablement ce dernier qui porte le plus loin et nous prévient des écueils. C’est un visionnaire dont le regard ne trompe pas. A ce sujet, cet artiste polyvalent, qui fut indifféremment peintre, écrivain, photographe, pitre et comédien, demande dans un de ses courriers à son ami Bronislaw Malinowski de lui envoyer des photos de philosophes anglo-saxons : « Il est très utile pour moi, pour saisir la pensée d’un philosophe, d’avoir au moins devant les yeux la photo de celui qui a écrit. » L’appliquant à lui même, on ne saurait mieux dire tant l’homme et l’œuvre sont un tout cohérent. Witkacy l’exprime sur « arrêt d’image » ou dans ses mimiques qui ne sont pas sans rappeler celles du dadaïste Raoul Hausmann. En déstructurant et déconstruisant le masque, elles font tomber l’obstacle illusoire des identifications, façon  d’artiste ou de bateleur d’éternité, comme on voudra.

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Il y a du Breughel, du Bosch, de l’Ensor dans les romans de Witkiewicz, comme dans ceux de Céline et je m’étonne, évoquant Rabelais, que Piotr Rawicz ne l’ait pas vu. Piotr Rawicz par lequel nous savons que Gallimard, sollicité pour publier Witkiewicz a loupé le coche, comme pour Céline ! Et c’est tant mieux parce qu’il revenait de droit à Vladimir Dimitrijevic de l’accueillir à l’Age d’Homme.

Contempteur de la modernité décadente et de la démocratie totalitaire infestée depuis les Grecs Witkacy de façon prémonitoire a prévu ce que serait le monde qui est le nôtre. Gérard Conio, qui souligne dans l’œuvre la lucidité de l’analyse witkacéenne, l’a bien compris : « A la démocratie nobiliaire du passé correspond dans le présent la démocratie capitaliste, insipide et insidieuse et Witkacy n’aura pas de mots trop durs pour dénoncer ce « chancre ». La montée des masses, telle qu’elle se produit en Occident du fait du progrès matériel, de ce que l’on appellera plus tard « la société de consommation » incarne à ses yeux le Mal Absolu. »

Dans ses « Réflexions et commentaires sur la philosophie de l’Unique Issue », Gérard Conio poursuit et nous ne pouvons qu’aller dans son sens à moins que d’être aveugle. Voici ce qu’il écrit page 241 : « Seuls les adeptes serviles du consensus idéologique occidental peuvent prétendre aujourd’hui que la victoire de la soi-disant démocratie américanoïde sur les « forces du mal » a fait triompher la justice et la liberté. La principale différence entre ce nouveau totalitarisme et les précédents consiste dans une inversion et une falsification des valeurs qui instrumentalise le langage lui-même et met directement le respect de l’individu, l’application des droits de l’homme, au service d’une aliénation qui ne s’exerce plus par la terreur mais par la séduction. Il se produit une réification générale qui entraîne la perte définitive des principes constitutifs de la dignité humaine. On ne se contente pas de tuer la liberté « au nom de » la liberté, comme l’ont fait toutes les révolutions, depuis 1789, mais on utilise la liberté elle-même pour mettre en place son contraire. On vit désormais sous le signe de l’oxymoron, ceux qui se disent : la « culture du marché », la « guerre humanitaire » et celui qui ne se dit pas mais qui les résume tous : le despotisme de la liberté.

Cette situation suggère une autre vision de l’histoire que celle qui a cours dans les grands moyens officiels d’information.

Tout en s’opposant « formellement », verbalement, aux précédents systèmes de domination, le fascisme, le nazisme, le communisme, la démocratie totalitaire les prolonge, les améliore, les parachève. Il y avait beaucoup de naïveté dans les moyens de coercition employés par ces idéologies qui, au moins, ne cachaient pas leurs véritables desseins. Les nouveaux maîtres du monde, les « oligarques », comme on les appelle en Russie, ont compris qu’il était vain de croire à la possibilité, à long terme, de conditionner l’être humain de l’extérieur, par le chantage, par la menace, par la torture, par la violence. Il est beaucoup plus facile et plus efficace de l’acheter. Le viol des consciences se perpètre aujourd’hui non du dehors, collectivement, mais du dedans, individuellement. Les individus eux-mêmes renoncent à leur individualité qu’ils troquent contre « les coupons de privatisation ». On assiste à la privatisation du monde, mais cette « privatisation » signifie la véritable fin de la conscience de soi de chaque Existence Particulière. »

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Et page 243, il poursuit : « Comme dans les anti-utopies de Zamiatine et d’Orwell, les individus perdent leur « particularité » pour devenir des numéros interchangeables, identiques. Cette élimination se concrétise par la fin de l’art et par le suicide de la philosophie. La crise de l’art moderne correspond à la destruction des valeurs esthétiques par les valeurs économiques et sociales. La rationalisation de l’empirisme logique annule le concept même d’ Existence Particulière. »

Quant à Witkacy, voici ce qu’il fait dire, page 168 de l’Unique Issue,  à l’un de ses « double », le peintre Marceli : « C’est maintenant seulement que, acculés au mur par la ruine spontanée du système capitaliste, sans même l’aide des forces socialistes en ébullition —la tumeur maligne a tout simplement commencé à pourrir— nous sommes sur le point de créer une culture universelle harmonisée par la régulation centrale de la production et de la répartition des biens dans le monde entier. Nous voulons remplacer l’absence et l’impossibilité d’une puissance régulatrice objective par la création d’un appareil pseudo-objectif, d’un groupe omniscient des cerveaux les plus forts, placés dans des carcasses de castrats du corps, sans appétence, sans intérêt pour la vie, un appareil qui régulerait la totalité de la vermine humaine sur la totalité de notre planète bien-aimée, une totalité absolue, car qui ne s’y soumet pas devra périr automatiquement. »

Voici, pour ceux qui le découvriraient, deux extraits tirés de « l’Inassouvissement ».

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« Mais tout semblait se dérouler dans un autre monde, quelque part au loin, au-delà d’une mystérieuse barrière qui était cependant en lui-même et non dans la réalité extérieure. Il n’était pas lui-même dans tout cela. Il se demandait avec étonnement : « Comment ? Donc c’est bien moi et c’est bien ma vie unique ? C’est comme cela qu’elle s’écoule et non autrement, parmi des milliards de possibilités ? Et jamais, plus jamais autrement — mon Dieu ! » Il sombrait dans un abîme vertigineux, dans un souterrain, dans une prison où régnait la douleur sèche, éternelle et étouffante de l’  « être-tel » (et non de l’ « être-autre »). Et il n’y avait pas d’issue. » (p.173)

« Oh ! où était la justice en ce monde ? mais ce qui était le pire, c’était que l’indignation, l’humiliation, la vexation, la colère, tout passait ou se changeait en un désir inconnu jusqu’alors, confinant à l’absolu sexuel incommensurable. La saloperie absolue obtenue à l’aide d’un transformateur intérieur qui transformait les « contenus » quelconques en une seule et unique espèce : sexuelle. Où était-il vraiment, sacré nom de Dieu, ce Zypcio détesté (on ne savait déjà plus par qui — c’était comme pour elle) ? Il y avait quelque chose qui souffrait salement, anéanti par cette femme personnelle, aplati comme une crêpe. Mais où était sa personnalité ? Elle s’était dissipée dans la nuit sauvage et magique de mars qui s’étendait sur Ludzimierz. En même temps que lui et sa tragédie, ce palais tout entier semblait être un petit pépin craché par on ne savait qui, au milieu de la menace de la nature et des événements imminents — si seulement ils avaient pu voir cela ! Mais pour eux, leurs propres problèmes et souffrances emplissaient l’univers jusqu’au bord. Les fictions notoires ne pouvaient leur faire mépriser leur importance personnelle — ils étaient un bétail sain. »(p. 221)

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On consultera avec profit le Cahier Witkiewicz N° 4 "Colloque de Bruxelles" aux éditions l'Age d'Homme.

A voir également: Witkiewicz, dramaturge génial en avance sur son temps; Anna Fialkiewicz-Saignes; Danuta Najdyhor; les videos suivante, malheureusement en polonais mais intéressantes par l'image.


 



18/04/2011

BULLETIN CELINIEN

Bulletin célinien n° 329

 

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Les amateurs de Céline seront agréablement surpris d’apprendre la publication par les Editions du Lérot, en un seul volume, des ouvrages de Jean-Pierre DAUPHIN : « Bibliographie des articles en langue française consacrés  à Céline ». La nouvelle édition, revue et augmentée, qui regroupe les périodes 1914-1944 et 1945-1961, forte de 470 pages s’intitule : « Bibliographie des articles de presse & des études en langue française consacrés à L-F Céline, 1914-1961 » On peut se la procurer par l’intermédiaire du Bulletin (BP 70, Gare centrale, B 1000 Bruxelles) ou directement chez l’éditeur (Du Lérot, éditeur, Les Usines Réunies, 16140 Tusson). Dans son éditorial, Marc LAUDELOUT souligne l’intérêt de ce « travail titanesque » qui couronne les efforts d’années de recherches.

En quatrième page, dans une note intitulée « Céline sur papier glacé », l’éditorialiste présente le dernier numéro hors série du Figaro Magazine « Céline, une saison en enfer ». On en conviendra, cette publication est une réussite autant par la teneur des articles que par leur accompagnement  iconographique. Photographies connues et moins connues ainsi que dessins, souvent tirés en pleine page qui l’illustrent à merveille, sont à la hauteur de la maquette de couverture. Nous attendons le hors-série de Télérama de juin 2011 en espérant qu’il aura la qualité de celui du Figaro.

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Dans une chronologie sur vingt années, courrant de 1967 à 1987, Marc Laudelout rappelle –et ce n’est que justice- ce que la recherche célinienne doit à l’universitaire Jean-Pierre Dauphin, organisateur du premier colloque international consacré à Céline à Oxford en 1975, et co-fondateur avec Henri Godard et Philippe Alméras de la Société d’Etudes céliniennes en 1976. On lui doit de nombreuses publications et études dont les 8 Cahiers Céline parus chez Gallimard entre 1976 et 1988. Jean-Pierre Dauphin est à l’origine de la création de la Bibliothèque Louis-Ferdinand Céline (BLFC) à l’Université Paris VII centre Jussieu.

Ce numéro d’avril rend hommage, sous la plume de Jean-Paul ANGELELLI à Jean José Marchand décédé à Paris le 8 mars dernier. Né en 1920, J.J. Marchand publia l’autobiographie de la première partie de sa vie au Rocher en 2001, sous le titre : »Le Rêveur ». Cet admirateur de l’œuvre de Drieu, de Willy de Spens, de Lucien Rebatet fut, comme le rappelle J.P Angelelli dans sa note, « un grand homme de télévision dans les années 60-70 comme en témoignent ces extraordinaires ‘Archives du XXe siècle » : des entretiens filmés avec cent cinquante personnalités, dont Morand, Montherland,, Lévi-Strauss, Caillois. Il y a un Monnerot, hélas resté innédit… ».

Ceux qui voudront approcher de plus près J.J. Marchand consulteront son blog qui court sur une année (août 2009-août 2010) et témoigne d’une grande érudition littéraire : Journal de lectures de Jean josé Marchand (http://jean-jose-marchand.over-blog.com).

La troisième partie de « Céline sur tous les fronts » de Marc Laudelout annonce une biographie de Céline par Henri Godard à paraître prochainement chez Gallimard. Dans le même temps paraîtra aux éditions Pierre-Guillaume de Roux une version corrigée et augmentée du « Céline. Entre haines et passion » de Philippe Alméras, paru initialement chez Laffont. Signalons également, à paraître aux éditions Michel de Maule, le recueil de souvenirs de Marouschka Dodelé qui fut élève des cours de danse de Lucette Almanzor : « Une enfance chez Louis-Ferdinand Céline ».

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Aux éditions Robert Laffont, collection « Bouquins », vient de sortir le gros ouvrage de David Alliot « D’un Céline l’Autre », préfacé par François Gibault. Près de 1200 pages de témoignages dispersés jusqu’alors dans des livres ou des revues, regroupés dans cette somme, nous apportent  à travers cette publication, le regard des contemporains de l’écrivain.

Deux personnalités sont évoquées dans ce numéro, toutes deux, amis de Céline. La première par Antoinette Le Vigan, dite Tinou, qui fut aussi l’épouse de Robert Coquillaud (1900-1972) dit Le Vigan, dit La Vigue par Céline ; elle a confié ses souvenirs à Eric MAZET, qui les rapporte ici en 1987. On y apprend que Céline, « Jupiter », régnait en maître sur ses amis et plus loin : « Quand je demandais à Céline pourquoi il écrivait avec des mots si orduriers, il me répondait : « Le niveau français, c’est la boîte à ordure !... ».

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On y apprend également la brouille de Le Vigan avec Céline entre 1941 et 1942 suite à des propos rapportés à ce dernier par Arthur Pfannstiel, traducteur en allemand de Bagatelles, concernant une supposée dénonciation par Le Vigan aux occupants, de Céline et Mahé comme défaitistes… Pour en savoir plus sur Robert Le Vigan, on, ne manquera pas de se reporter aux biographies que lui ont consacré Hervé Le Boterf (Robert Le Vigan, le mal aimé du cinéma, paru en 1986 chez France-Empire) et Claude Beylie et André Bernard (Robert Le Vigan, désordre et génie, paru en 1996 chez Pygmalion)

Le portrait de la seconde personnalité, du à la plume d’Alain CAMPIOTTI, concerne l’anthropologue George Montandon (1879-1944) qui devint l’ami de Céline à la fin des années trente. Il y voit les sympathies de ce médecin aventurier pour le bolchevisme, doctrine dont Montandon traita dans un ouvrage de 1923 : « Deux ans chez Koltchak et chez lez bolcheviks ». Ce fils de riche industriel obtint ses diplômes de médecine en Suisse.

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Passionné d’ethnologie, après des études en Angleterre et en Allemagne, il se rend en Abyssinie en 1910 où il exerce ses talents auprès du souverain, puis après la première guerre mondiale, il s’occupe du rapatriement de prisonniers austro-hongrois dispersés en Sibérie, alors que la guerre civile fait rage en Russie. Il y rencontrera des chefs bolcheviques tout en menant des études d’anthropologie locale, et dans la foulée, fréquentera les hordes du « Baron fou » von Ungern-Sternberg. Arrêté par la Tchéka, accusé d’espionnage, il finira par se tirer d’affaire et publiera son livre d’aventures chez les Bolcheviques ; récit picaresque qui n’est pas, comme le note Alain Campiotti, sans avoir quelques accents céliniens avant la lettre… Céline, qui a connu et lu Montandon s’en est inspiré pour ses pamphlets et le cite dans l’Ecole des cadavres.

Enfin nous n’omettrons pas d’évoquer la première partie de l’excellente étude qu’Agnès HAFEZ-ERGAUT consacre à « Casse-Pipe » au travers de son analyse : « Hommes, chevaux et guerre dans Casse-Pipe ». Non seulement elle donne envie de relire ce petit chef d’œuvre, mais elle donne aussi celle de s’attarder sur la misère et la grandeur oubliée de ces compagnons de tout temps des hommes que furent les chevaux, et dont on oublie -ou pire on ignore- que près d’un million deux cent mille de ceux appartenant à la seule armée française resta sur les champs de bataille.

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C’est ce que rapporte une note de cette étude : « Il est dit que le chiffre officiel des chevaux morts (section vétérinaire de l’armée) serait gravé sur une plaque se trouvant dans une salle interditre au public du château de Saumur. Le texte en serait : « Aux 1.140.000 chevaux de l’armée française morts pendant la guerre mondiale 1914-1918. Le Musée du Cheval reconnaissant, 1923. ». Casse-Pipe, accompagné de riches appendices, constitue la première partie du troisième volume des romans de Céline édités dans la Pléiade.