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16/10/2021

16 0CT0BRE 1793

Exécution place de la Révolution à Paris (actuelle place de la Concorde) le 16 octobre 1793 à 12H 15, de la Reine Marie-Antoinette.

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La Reine fut conduite à l’échafaud à l’issue d’un procès convenu qui dura deux jours et auquel ses deux défenseurs, Chauveau-Lagarde et Tronçon- Ducoudray, furent commis d’office.

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A 4H du matin, le 16 octobre, la sentence tombe : l’infortunée reine de France sera exécutée le jour-même.

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La Reine se prépare et vers onze heures, quitte la Conciergerie pour monter dans la charrette qui mettra une heure pour gagner le lieu du supplice. Les mains liées, la condamnée est placée face au peuple et non dans le sens de la marche, comme elle le souhaitait. L’abbé Girard, prêtre constitutionnel dont elle refusera les secours de la religion, est à ses côtés.

Arrivée devant l’échafaud, la Reine s’y précipite et parvenue au fait de l’échelle de meunier, tombe sur les peids du bourreau Sanson… C’est alors qu’elle a ses mots dont l’histoire s’est fait l’écho : « Monsieur, je vous demande pardon, je ne l’ai pas fait exprès. »

A 12H 15 précises sa tête tombe et selon la coutume, le bourreau ou l’un de ses aides s’en empare pour la montrer au peuple…

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Georges Lenôtre a bâti son ouvrage intitulé « La captivité et la mort de Marie-Antoinette » à partir des relations de témoins oculaires et de documents inédits. La lecture en est des plus intéressante. On y apprend, entre autre, comment fut découvert chez Robespierre après sa mort, dans une cache ménagée sous le lit, le testament de la Reine, ainsi que divers documents relatifs à sa captivité. On y apprend surtout quel fut le cheminement de cette précieuse relique échappée par miracle aux désastres du temps.

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En voici le texte, écrit le 16 octobre 1793 à 4H et demie du matin, et qui ne sera jamais parvenu à sa destinataire, Madame Elisabeth, puisqu’il sera subtilisé le jour-même.

 

 

ce 16 8bre à 4 h ½ du matin

C’est à vous, ma Sœur, que j’écris pour la dernière fois. Je viens d’être condamnée non pas à une mort honteuse, elle ne l’est que pour les criminels, mais à aller rejoindre votre frère ; comme lui innocente, j’espère montrer la même fermeté que lui dans ces derniers moments. Je suis calme comme on l’est quand la consience[sic] ne reproche rien, j’ai un profond regret d’abandonner mes pauvres enfants ; vous savez que je n’existois que pour eux, et vous, ma bonne et tendre Sœur : vous qui avez par votre amitié tout sacrifié pour être avec nous ; dans quelle position je vous laisse ! J’ai appris par le plaidoyer même du procès que ma fille étoit séparée de vous. Hélas ! la pauvre enfant, je n’ose pas lui écrire, elle ne recevroit pas ma lettre je ne sais même pas si celle-ci vous parviendra, recevez pour eux deux ici, ma bénédiction. J’espère qu’un jour, lorsqu’ils seront plus grands, ils pourront se réunir avec vous, et jouir en entier de vos tendres soins. Qu’ils pensent tous deux à ce que je n’ai cessé de leur inspirer, que les principes, et l’exécution exacte de ses devoirs sont la première base de la vie ; que leur amitié et leur confiance mutuelle, en feront le bonheur ; que ma fille sente qu’à l’âge qu’elle a, elle doit toujours aider son frère pour les conseils que [rature] l’expérience qu’elle aura de plus que lui et son amitié pourront lui inspirer ; que mon fils à son tour, rende à sa sœur, tous les soins, les services que l’amitié peut inspirer ; qu’ils sentent enfin tous deux que, dans quelque position où ils pourront se trouver, ils ne seront vraiment heureux que par leur union. Qu’ils prennent exemple de nous, combien dans nos malheurs, notre amitié nous a donné de consolations, et dans le bonheur on jouit doublement quand on peut le partager avec un ami ; et où en trouver de plus tendre, de plus cher que dans sa propre famille ? Que mon fils n’oublie jamais les derniers mots de son père, que je lui répète expressément : qu’il ne cherche jamais à venger notre mort. J’ai à vous parler d’une chose bien pénible à mon cœur. Je sais combien cet enfant, doit vous avoir fait de la peine ; pardonnez-lui, ma chère Sœur ; pensez à l’âge qu’il a, et combien il est facile de faire dire a[sic] un enfant ce qu’on veut, et même ce qu’il ne comprend pas, un jour viendra, j’espère, où il ne sentira que mieux tout le prix de vos bontés et de votre tendresse pour tous deux il me reste à vous confier encore mes dernières pensées. J’aurois voulu les écrire dès le commencement du procès ; mais, outre qu’on ne me laissoit pas écrire, la marche en a été si rapide, que je n’en aurois réellement pas eu le tem.

Je meurs dans la religion catholique, apostolique et romaine, dans celle de mes pères, dans celle où j’ai été élevée, et que j’ai toujours professée, n’ayant aucune consolation spirituelle à attendre, ne sachant pas s’il existe encore ici des prêtres de cette religion, et même le lieu où je suis les exposeroit trop, si ils[sic] y entroient une fois. Je demande sincèrement pardon à Dieu de toutes les fautes que j’ai pu commettre depuis que j’existe. J’espère que dans sa bonté il voudra bien recevoir mes derniers vœux, ainsi que ceux que je fais depuis longtems pour qu’il veuille bien recevoir mon âme dans sa miséricorde et sa bonté. Je demande pardon à tout ceux que je connois, et à vous, ma Sœur, en particulier, de toutes les peines que, sans le vouloir, j’aurois pu vous causer. Je pardonne à tous mes ennemis le mal qu’ils m’ont fait. Je dis ici adieu à mes tantes [rature] et à tous mes frères et sœurs. J’avois des amis, l’idée d’en être séparée pour jamais et leurs peines sont un des plus grands regrets que j’emporte en mourant, qu’ils sachent, du moins, que jusqu’à mon dernier moment, j’ai pensé à eux. Adieu, ma bonne et tendre Sœur ; puisse cette lettre vous arriver ! pensez toujours à moi ; je vous embrasse de tout mon cœur, ainsi que ces pauvres et chers enfants ; mon Dieu ! qu’il est déchirant de les quitter pour toujours. Adieu, adieu ! je ne vais plus m’occuper que de mes devoirs spirituels. Comme je ne suis pas libre dans mes actions, on m’amènera peut-être, un prêtre, mais je proteste ici que je ne lui dirai pas un mot, et que je le traiterai comme un être absolument étranger.

Cette lettre, remise par la reine au concierge Bault, fut transmise à Fouquier-Tinville qui la parapha et la conserva quelque temps. C’est Courtois député de l’Aube et rapporteur de la Commission chargée d’examiner les papiers de Robespierre qui la récupéra et la tint secrète jusqu’au moment où il décida de s’en dessaisir en 1816.

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La Reine, quinze jours après sa décapitation fut inhumée par le fossoyeur Joly, dans un coin du cimetière de la Madeleine, non loin de son époux. Lenôtre, dans son ouvrage, donne le plan du quartier permettant de localiser l’emplacement des sépultures.

L’exhumation des corps aura lieu en Janvier 1815.

Le 21 du même mois, les restes de Louis XVI et de Marie-Antoinette furent solennellement portés dans le caveau des Bourbons en l’église de Saint-Denis.

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La chapelle expiatoire du square Louis XVI, rue d’Anjou, inaugurée en 1826, fut élevée sur ordre du roi Louis XVIII à l’endroit même où avaient été inhumés les corps…

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Qui se souvient aujourd'hui de la Reine, sinon ceux demeurés fidèles au Coeur du Roi ?

NON SOLUM IN MEMORIAM SED IN INTENTIONEM

06/12/2018

OÙ VA L’ARGENT DE LA TRANSITION ENERGETIQUE ?

La transition énergétique serait-elle l’alibi qu’aurait tiré de son chapeau la superclasse mondiale pour saigner à blanc les classes populaires ?
A considérer le matraquage médiatique permanent et les discours culpabilisants du Président, de ses ministres et de la caste parlementaire à l’endroit des sceptiques, on est en droit de se le demander !

Dès lors qu’on s’intéresse d’un peu près à la question, on voit que cette loi, votée en 2015 en vue de « sauver la planète » dans la foulée du GIEC et autres COP 21 et suivantes, n’est qu’un leurre destiné à soutirer un maximum d’argent au contribuable resté taillable et corvéable à merci et au pouvoir à se maintenir en place.

Car enfin, au prétexte de cette nouvelle parodie de religion qu’est la « Vertitude », qui n’est rien d’autre que la nouvelle servitude qu’ont trouvée de soit disant « écologistes » dans le seul but de conserver leurs privilèges et leur poids attaché à leur lobby politique, nous voici contraints, non seulement à nous soumettre à cette loi inique mais également à la servir avec zèle faute de quoi nous nous verrions bien vite exposés au ban de la société.

La transition énergétique, comme toute religion révélée, est édifiée sur un dogme : celui du réchauffement climatique, ou plus exactement, des « causes » dudit réchauffement. Car si l’on ne peut nier le réchauffement climatique, on est conduit, pour peu qu’on s’y intéresse de près, à devoir douter de ses causes. Tout géologue, astrophysicien et climatologue sérieux sait mieux que personne, comme le démontrent clairement les paramètres de Milankovic que, des phénomènes solaires et de la dynamique terrestre, dépendent les variations climatiques à la surface de la terre. Que les activités humaines affectent quelque peu les couches de la basse atmosphère, sans doute, personne ne le niera mais de là à prétendre que ce sont elles les responsables du réchauffement climatique et elles seules est une autre affaire !

Le dernier interglaciaire, celui de l’Holocène dans lequel nous nous trouvons, ayant suivi la glaciation de Würm, correspond également à la dernière phase de l’ère quaternaire. Les interglaciaires, de plus courte période que les glaciations ont une durée variable calée entre 10 000 et 20 000 ans. Or le nôtre, à cause des phénomènes exceptionnels se produisant à la surface du soleil, devrait avoir une durée au moins deux fois plus longue le séparant d’une nouvelle glaciation. Contrairement à ce qui est officiellement avancé, il est probable que les phénomènes solaires ont une incidence bien supérieure à celle de la concentration des gaz à effet de serre dans la basse atmosphère sur le réchauffement climatique et en soient la cause principale, sinon unique.

Cela étant, refuser d’exploiter cette manne tombée du ciel eût été pour la ploutocratie régnante une occasion manquée de s’enrichir toujours davantage, le climat ayant bon dos.

Voilà pourquoi, au nom de la sacro-sainte Vertitude, taxes et surtaxes n’ont cessées et ne cessent de pousser comme la mauvaise herbe. Ce qui, si on les ajoute les unes aux autres, représente des sommes considérables.

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A titre d’exemple, la seule CSPE (Contribution au Service Public de l’Electricité) a soutiré à elle seule 8 milliards d’euros aux consommateurs d’électricité en 2017 ; pour cette même année, la TICPE (Taxe Intérieure de Consommation sur les Produits Energétiques, montant 30,5 milliards) a rapporté 17,2 milliards d’euros au budget de l’état.

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(Rapport général de l'Assemblée Nationale sur le PLF 2019)

 

Inutile de dire, dans les perspectives actuelles, que ces taxes sont appelées à augmenter.
Dans le même temps que voit-on ?

-  Une multiplication des parcs éoliens en France, inutiles et polluants, coûts exorbitants ;

-  une surconsommation d’électricité entraînée par des produits toujours plus énergivores et toujours plus coûteux (dernière trouvaille : la voiture électrique !) ;

-  la multiplication de produits polluants issus du pétrole, partout présents (plastiques et dérivés : emballages, textiles, menuiseries, automobiles, aéronautique, éoliennes, décoration, etc, etc, etc...) ;

-  des déplacements terrestres aériens et nautiques toujours plus nombreux et polluants ;

-  une agriculture industrielle artificielle toujours plus polluante ;

-  un gaspillage monumental d’argent public tous azimuts (dont la liste des

destinations serait politiquement incorrecte à établir) ;

-  enfin, l’impossibilité qu’à l’Ecologie réelle, dévoyée par l’écologie politique aux mains d’idéologues bornés l’ayant transformée en écologie punitive, de contribuer à l’équilibre et à la préservation de notre oecoumène.

Faut-il s’étonner, dès lors, que les beaux discours de la ploutocratie régnante non seulement ne soient pas compris mais soient rejetés par un nombre toujours grandissant de citoyens de plus en plus exaspérés par les privilèges que celle là s’arroge quand ceux-ci, non seulement s’appauvrissent, mais voient leur exigence d’un « mieux relatif », incessamment bafouée au nom du « sauvetage de la planète » et du mythe de l’idéologie du progrès ?

Il ne faut pas s’en étonner et pas davantage quand le peuple se réveille, c’est alors, comme la mer démontée qu’il cesse d’obéir ("Quand les peuples cessent d’estimer, ils cessent d’obéir" - Rivarol) et renverse les idoles qu’innocemment il s’était données.

"Car ce sont les temps du Grand Changement qui maintenant, viennent..." - Dominique de Roux

 

09/02/2012

REVERIES D'UN PAIEN MYSTIQUE

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Gustave Doré 1875: Highlands, Ecosse

Louis MENARD publie ses « Rêveries d’un Païen Mystique » chez Lemerre en 1876, il a alors 54 ans ; de nouvelles éditions augmentées suivront en 1886, 1890, 1895, 1909 et 1911. L’édition actuelle, publiée en 1990 par Guy Trédaniel reprend le texte de 1909. Elle est présentée par Gilbert ROMEYER DHERBEY, Professeur à l’Université de Paris-Sorbonne.

Louis Ménard, né à Paris rue Gît-le-Cœur (un nom prédestiné !) le 19 octobre 1882, meurt dans sa ville natale à l’âge de 79 ans le 9 février 1901. Condisciple de Baudelaire au lycée Louis-le-Grand, il intègre l’Ecole Normale Supérieure en 1843. Il n’y restera pas longtemps, son tempérament farouchement indépendant le portant à s’affranchir très vite de la tutelle de ses maîtres. Après des études de Lettres il s’exerce à la chimie ( dont il avait quelque peu tâté en compagnie de Baudelaire en préparant la confiture verte du club des « Haschischins ») et découvre en 1846 le collodion, mélange de nitrocellulose, d’éther et d’alcool. Ses recherches dans ce domaine contribueront à mettre au point la nitro-glycérine.

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Poète romantique dans l’âme, Ménard prend fait et cause pour la Révolution de 1848 aux côtés de Proudhon. Séduit par le blanquisme, ses publications lui valant condamnation il s’exile en Angleterre puis en Belgique où il fera la connaissance de Marx.

Bénéficiant de l’amnistie impériale, Louis Ménard, ayant réintégré Paris se consacre à l’étude des sociétés et des religions antiques et plus particulièrement à la Grèce ancienne. Cet engouement le conduira à soutenir et publier deux thèses : « De la morale avant les philosophes » (1860) et « Du polythéisme hellénique » (1863). En 1893 paraîtra chez Delagrave en deux volumes sa monumentale « Histoire des Grecs » (1032 pages). Pour Louis Ménard, les religions sont les fondations des sociétés humaines, et tout en découle. Dans sa première thèse, il note que  « Les religions sont la vie des peuples (…) l’art, la science, la morale et la politique s’en déduisent comme une conséquence de son principe. ». Et voici ce qu’il écrit dans sa seconde thèse et que cite Gilbert Romeyer Dherbey :  « Cette fusion intime entre le religieux et le quotidien, ce que l’on pourrait appeler un sens religieux de l’immanence, se résume dans l’expérience de ce que le Grec appelle le divin, et qui sans cesse éclate à ses yeux émerveillés. Rien ne lui est plus étranger que l’idée d’un Dieu lointain, et plus encore d’un Dieu caché ; sans cette proximité du divin, la prière serait inutile et le culte absurde. »

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Ce « Païen mystique », ami de Leconte de Lisle,  qui rejoindra un temps l’école des peintres de Barbizon et soutiendra la Commune de 1871, est surtout connu pour ses « Rêveries » qui sont une suite de 30 tableaux dont un peu moins de la moitié sont suivis de poèmes. Dans le premier tableau où s’affrontent les contraires qui ne sont que la vieille histoire du combat de la Lumière et des Ténèbres ou si l’on préfère d’Ormuz et d’Ahriman, il fait parler le Diable :  « … La vie ne s’entretient que par une série de meurtres, et l’hymne universel est un long cri de douleur de toutes les espèces vivantes qui s’entredévorent. L’homme, leur roi, les détruit toutes ; il faut des millions d’existences pour entretenir la vôtre. Quand vous ne tuez pas pour manger, vous tuez par passe-temps ou par habitude, et votre empire n’est qu’un immense charnier. »

Rappelons-nous CELINE, dans une vision très ahrimanienne, lui aussi notait qu’il n’y avait pas de bonheur dans ce monde, qu’il n’y avait que des malheurs plus ou moins grands ; à quoi il ajoutait que ça n’était pas le bon Dieu qui gouvernait, mais le Diable.

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Il est probable, sinon certain que Céline ait lu Louis Ménard, puisque les « Rêveries » comptaient au nombre des ouvrages consultés par l’exilé danois dans sa prison, à la Vestre Faengsel, entre décembre 1945 et février 1947 (page 198 in « Images d’exil », par Eric Mazet et Pierre Pécastaing, du Lérot éditeur 2004).

Louis Ménard, pour lequel au commencement était la religion (dans l’acception étymologique qui ne trompe pas), Louis Ferdinand Céline pour lequel au commencement était l’émotion, se rejoignent en cela que tous deux, mystiques à leur manière, avaient senti les liens secrets qui les attachaient aux âmes des souffrants « étincelles du feu céleste tombées des calmes régions de l’éther dans la sphère agitée de la vie. » (11e texte des Rêveries : « Lettre d’un mythologue »).

Nul doute qu’il y ait antériorité du phénomène religieux sur les autres faits sociaux ; ce qu’à bien montré Henry CORBIN dans son gros ouvrage « En Islam iranien », volume 1 collection TEL:  « Le phénomène religieux, la perception de l’objet religieux, est un phénomène premier (un Urphaenomen), comme la perception d’un son ou d’une couleur. Un phénomène premier n’est pas ce que l’on explique par autre chose, quelque chose que l’on fait dériver d’autre chose. Il est donné initiale, le principe d’explication, ce qui explique beaucoup d’autres choses. » Ce que nos sociétés décadentes ont perdu de vue, qui ont dans le même temps, perdu le sens des valeurs et de la première d’entre elles : le sacré.

Voici, dans son intégralité, le 28e texte des Rêveries d’un Païen Mystique :

 

LETTRE D’UN MANDARIN

 Au directeur de la Critique philosophique.

 

 

Monsieur,

L’Europe est très fière de sa civilisation. Les peuples de l’Extrême-Orient, frappés des avantages matériels que vous donnent les applications de vos sciences, envoient, depuis quelques années, leurs enfants étudier dans les écoles de l’Occident. Ces jeunes gens ont pu comparer votre état moral à celui de leurs compatriotes, et permettez-moi de vous dire que cette comparaison n’est pas toujours à votre avantage. Voulez-vous permettre à un étudiant bouddhiste de répondre quelques mots à un article publié dans votre dernier numéro sur les bienfaits de la vivisection ?

L’auteur de cet article parle avec un suprême dédain de la Ligue antivivisectionniste, dont les adhérents ne sont, suivant lui, que « des natures toutes de sentiment et de passion, chez lesquelles le raisonnement n’a point de part au conseil ». M. le docteur P. se trompe : la Ligue antivivisectionniste, dont je m’honore de faire partie, ne repose pas, comme il le croit, sur une nervosité maladive, mais sur un principe de raison, ou ce qui vaut mieux encore, sur un principe de conscience. Lors même que les expériences de M. Pasteur seraient utiles, ce qui est contesté, cela ne prouverait pas qu’elles soient justes.

Où ai-je donc lu cette phrase : « Il est avantageux qu’un seul homme périsse pour la nation ? » Je crois que c’est dans l’Evangile, qui condamne évidemment la politique utilitaire, car il met ce mot dans la bouche de Caïphe, un des meurtriers de votre Dieu. Il est vrai que le texte parle d’un homme, et non d’un autre mammifère ; mais la morale n’est-elle impérative qu’entre les êtres de même espèce ? Si, comme l’espère M. Renan, le Darwinisme produisait, par sélection, une race d’animaux supérieure à l’espèce humaine, cette race aurait-elle le droit de nous soumettre, dans son intérêt, à des expériences de vivisection ? Je suis étonné de trouver dans la Critique philosophique le point de vue de la justice absolue subordonné à celui d’une utilité supérieure : cela conduit aux arguments tirés de la raison d’Etat. La veuve de Claude Bernard, pour réparer les crimes de la physiologie expérimentale, a ouvert un asile de chiens. Au jugement dernier, cette offrande expiatoire d’une humble conscience de femme pèsera plus, dans l’infaillible balance, que toutes les découvertes de son mari.

Il n’y a pas de conquête scientifique qui vaille le sacrifice d’un sentiment moral. Or le premier de tous, celui qui nous révèle la loi de Justice, c’est le sentiment de la pitié. On voit un être qui souffre, on se dit : »comme je souffrirais si j’étais à sa place ! » et on souffre avec lui, comme l’indique l’étymologie même du mot sympathie, en grec, compatir ; ce sentiment est plus vif à l’égard des êtres qui se rapprochent de nous par leur organisme : on s’apitoie sur un vertébré plus que sur un insecte, parce que l’insecte nous paraît moins susceptible de douleur. La compassion est fondée sur l’analogie des systèmes nerveux, et non sur la hiérarchie intellectuelle, et personne n’admet que, pour épargner une souffrance à un homme d’esprit, on puisse l’imposer à un imbécile. S’il s’agit d’une hiérarchie morale, c’est bien autre chose encore : prétendra-t-on qu’aux yeux de l’éternelle Justice, Néron est plus élevé dans l’échelle des êtres que mon bon chien qui me défend et donnerait sa vie pour moi ? Dans le ciel bleu de l’Idéal, la bonté est bien au-dessus de l’intelligence. Le Diable est très intelligent : voudriez-vous lui ressembler ?

En infligeant aux animaux des tortures imméritées, vos savants, qui ne croient pas à la métempsychose, n’ont pas l’excuse de dire qu’elles sont l’expiation de fautes commises dans une existence antérieure. Toute souffrance injuste est un crime de Dieu : par la vivisection, l’homme s’associe à ce crime. Ce n’est pas le péché qui accuse la Providence, puisqu’il est notre œuvre ; ce n’est même pas la douleur de l’homme, qui n’est qu’une épreuve pour son courage, comme l’ont si bien dit les Stoïciens : c’est la douleur des êtres inconscients et impeccables, des animaux et des enfants. Avant qu’il y eût des hommes sur la terre, la vie s’entretenait comme aujourd’hui par une série de meurtres. Il y avait des dents aiguës et des griffes acérées qui s’enfonçaient dans les chairs saignantes. Qui osera dire que cela est un bien ? Si le Créateur n’a pas voulu ou pas pu épargner à ses créatures, je ne dis pas la mort, mais la douleur, son œuvre est mauvaise, et il aurait mieux fait de rester dans son repos. Voilà pourquoi nous refusons de l’adorer ; les images qu’on voit dans nos pagodes ne sont pas celles du Dieu qui a fabriqué, avec une férocité ingénieuse, les griffes rétractiles du tigre, les crochets venimeux de la vipère et les âmes sans pitié des savants vivisecteurs, ce sont les images d’un homme qui n’a jamais fait souffrir volontairement aucune des créatures vivantes, et qui les embrassait toutes, sans distinction, dans son inépuisable et universelle charité.

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Cette charité bouddhique, qui s’étend aux animaux, vous paraît très ridicule, car vous n’admettez pas que l’homme ait des devoirs envers ses frères inférieurs.Peut-être la conscience n’est-elle pas la même en Orient et en Occident. Bien des choses me le font craindre. Vous êtes implacables pour les vaincus dans les luttes civiles, mais vous êtes pleins de tendresse pour les criminels de droit commun ; la peine de mort vous répugne, excepté en matière politique, et alors l’adoucissement des mœurs vous suggère des euphémismes : les assassinats de prisonniers ne sont plus que des exécutions sommaires, et le progrès des sciences vous permet de remplacer la guillotine par une mitrailleuse. Votre jury trouve toujours des circonstances atténuantes pour les parricides. Vous avez des trésors d’indulgence pour les parents qui torturent leurs enfants : ils en sont quittes pour quelques mois de prison. Il ne se passe guère de semaine sans que les journaux racontent quelque horrible histoire d’enfants martyrs et ils ne manquent pas d’ajouter que la police a eu toutes les peines du mode à empêcher le peuple de lyncher ces scélérats, coupables du plus lâche de tous les crimes. On ne prendrait pas tant de précautions pour protéger un insurgé contre les fureurs bourgeoises, les coups d’ombrelle des belles dames, les coups de canne des jolis messieurs. Il est vrai que si l’insurrection réussit, les rebelles deviennent des héros de juillet, et vous gravez leurs noms sur une colonne de bronze. Car vos jugements se modifient dans un sens ou dans l’autre, quand vos intérêts sont en jeu : vous vous indignez contre Orsini, mais vous glorifiez Charlotte Corday, et un de vos poètes l’appelle l’Ange de l’assassinat.

Toutes ces choses, et bien d’autres encore, me font croire que les occidentaux, plus civilisés que nous sous le rapport matériel, n’ont pas des idées très nettes sur la morale. Et pourtant si on n’avait pas cette pauvre petite lumière tremblotante de l’impératif catégorique, il ne resterait plus qu’à dire avec Çakya-Mouni et M. de Hartmann :  « Que le monde finisse, puisque rien ne peut le corriger ! ».

 

                                                                                                      Lou-Yi.

Mandarin à bouton de cristal.