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26/03/2010

BULLETIN CELINIEN

Bulletin célinien n° 317

 

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C'est un numéro consacré pour l'essentiel à la « correspondance » récemment publiée dans la Pléiade, et à Albert Paraz, que nous propose Marc LAUDELOUT pour cette 317 ème livraison du bulletin.

Outre l'article fouillé d'Etienne NIVELLEAU, repris ici et déjà publié dans Rivarol (12 février 2010) dans lequel l'auteur regrette l'absence de quelques lettres qui auraient mérité de trouver place parmi les douze cents retenues par l'éditeur, on lira avec intérêt celui de Robert LE BLANC qui rétablit quelques vérités, et non des moindres !

S'il faut n'en citer qu'une, nous nous arrêterons à celle relevée par Robert Le Blanc dans l'édition, chez Gallimard, des « Lettres à la NRF » :  Déjà, en 1991, une note stupéfiante m'avait arrêté dans les Lettres à la NRF, plus précisément la lettre à Nimier du 13 mars 1957 (lettre non reprise en Pléiade), où Céline écrit : « Rilke, Faulkner, Passos : extases ! extases ! Là Aury se donne, et Paulhan ! voilà les genres reconnus par la NRF ! pour eux Gaston y va de ses 500 sacs par mois ! Quand je dis qu'il sabote ses auteurs je ne dis rien que d'évident ! aucune publicité et le silence absolu de son propre torchon ! il fait ainsi plaisir je l'admets à Marcel et jean dont les œuvres complètes en papier-cul trouveraient à peine amateurs dans les wc périphériques... »

Tout le monde a reconnu en Marcel et Jean les directeurs de La Nouvelle NRF (ce « torchon » !), Arland et Paulhan, qui n'étaient pas des auteurs à grand tirage. Tout le monde, sauf l'annotateur de service (Pascal Fouché), qui explique doctement dans une note de cinq lignes : « Il peut s'agir de Marcel Aymé, ou de Marcel Pagnol ; pour Jean on peut penser à Genet ou à Giono ! »...

On se demande en effet comment le dit annotateur a pu supposer qu'en Marcel, Céline visait Marcel Aymé, fidèle ami de l'ermite de Meudon. Merci à Robert Le Blanc d'avoir relevé cette bévue et de terminer sa note par cette conclusion bien d'actualité :

Céline plaçait plutôt son idéal artistique dans les siècles passés : les moralistes du XVIIème, Villon, et Du Bellay pour la poésie, et... quelques compositeurs sur instruments anciens. Ceux-ci, il les évoque dans une lettre d'avril 1948, qu'il convient de verser au débat sur l'identité nationale :

« Les Français ? je suis un des très rares imbéciles à avoir tout perdu (...) pour qu'on épargne, préserve, perpétue leur sale race dégénérée. Je ne le fais pas pour eux. Je le fais pour Couperin, pour Claude Gervaise, pour Clément Jannequin ! »

Dans sa note intitulée : « Albert Paraz, l'homme-orchestre », Pierre LALANNE évoque ce mal aimé de la littérature qui ne doit d'être connu par beaucoup de céliniens, que par le fait d'avoir publié dans trois de ses livres : « Le Gala des Vaches », « Valsez saucisses » et « Le Menuet du Haricot », des souvenirs de Céline et quelques unes de ses lettres. On a reproché à Paraz de s'être fait par là une publicité facile, c'était mal le connaître et comme l'explique Pierre Lalanne, douter d'une amitié sans faille et d'une admiration sans bornes ; il le dit « un homme d'une sincérité arbitraire et sans concessions pour la connerie humaine », possédant  « un sens inné pour l'équité où, dans son esprit, le faible et le persécuté ont droit à toute sa considération, son énergie et sa défense inconditionnelle ». On lira donc avec d'autant plus de profit, les « Lettres à Albert Paraz », renfermant la correspondance de 1947 à 1957, complément indispensable au gros volume de la Pléiade. Cette publication est analysée en fin de bulletin par P-L MOUDENC.

On trouvera enfin, dans ce même numéro, deux des photos prises par Michel BERNARD en juin 1956 à Meudon, qui nous montrent l'ermite de la Villa Maïtou, en compagnie de son ami Paraz.

 

 

 

19/03/2010

L'IVRE D'IMAGES (1)

 

 

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Pour l'enfant, amoureux de cartes et d'estampes,

L'univers est égal à son vaste appétit.

Ah! que le monde est grand à la clarté des lampes!

Aux yeux du souvenir que le monde est petit!

(Charles Baudelaire, « Le Voyage »)


ALBUMS D'EPICERIE

 

 

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Il fut un temps, entre la première guerre mondiale et le début des années soixante où l'on collectionnait de petites images appelées vignettes, qu'on collait chacune à leur place dans des albums thématiques commandés à l'usine ou demandés à l'épicière du quartier. On trouvait ces images dans des tablettes de chocolat, des boîtes de cacao, des paquets de café, des paquets de biscottes et d'entremets, quelquefois même, dans des boîtes de pâtes alimentaires. On les échangeait à l'école à la faveur des récréations ou dans le fond de la classe, du moins pour ceux qui avaient la chance d'occuper ces places privilégiées !

 

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Chaque fabricant rivalisait de zèle, pour accompagner ses produits des vignettes les plus attractives ! Sur ce point, les grandes marques de chocolat, Menier, Suchard, Poulain se disputaient, à juste titre la première place car chacune, tant par la qualité de ses productions que par la beauté de ses vignettes nous laissait dans l'expectative tant il nous paraissait impossible de pouvoir les départager. Encore était-ce sans compter sur le gros du peloton qui les suivait roue dans roue !

 

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Qui se souvient aujourd'hui de Pupier, Meurise, Tobler, Louit, Guérin-Boutron, Kohler, Aiguebelle, Rozan, Cémoi ? Qui se souvient du café Gilbert et des produits Bozon-Verduraz ? dont le seul nom me ravit le jour où ma grand'mère me remit une boîte en carton pleine des vignettes représentant les généraux, maréchaux et amiraux de la Grande Guerre, patiemment collectionnées par mon père. J'étais bien jeune alors, et n'en ai conservé que le souvenir de les avoir dispersées aux quatre vents... Mais les noms me sont restés de la plupart des chefs de guerre qu'elles représentaient, dont il me semblait que certains sonnaient bien à l'oreille, comme ceux des généraux Guyot de Salins, Langle de Carry, Lenfant, Hirschauer,  ou celui de l'amiral Ronarc'h...

Elles étaient en couleur, comme la majorité des vignettes publicitaires, et le dessinateur avait représenté chacun de ces portraits en buste plutôt qu'en pied, en grande tenue aux couleurs de l'arme. Le dos de l'image nous apprenait en quelques lignes les faits marquants d'une vie glorieuse qui me laissait rêveur quand je disposais en ordre de bataille mes soldats en aluminium. Mais je dois avouer que c'est dans les illustrations des Fables de la Fontaine que je trouvais principalement mon bonheur, d'autant plus que mon aîné de cousin, qui les avait collectionnées avant moi, m'avait remis en une fois suffisamment de doubles pour remplir un album tout entier !  C'est dans ces albums (car il y en avait deux), édités par le chocolat Menier, que j'appris les fables les plus connues ; j'y goûtais, autant que dans le « Benjamin Rabier » ou dans le « Grandville », le talent de l'illustrateur et son pouvoir de suggestion.

Quand la photographie, systématiquement, se mit à remplacer l'image, les albums perdirent à la fois  leur charme et  leur intérêt : ils ne nous firent plus rêver... Ce fut le début de la fin qui marqua les années soixante.

Je me mis alors, d'abord chez les Compagnons d'Emmaüs et sur les brocantes -on disait « marchés aux puces »-  à rechercher l'aristocratie du genre, celle qui tenait le haut du pavé dans les années trente qui avaient précédé mon enfance, et que j'attribue pour ma part au chocolat Pupier dont la trilogie « Europe » « Afrique » « Asie », valait à elle seule qu'on s'y attardât. J'appris ainsi qu'il existait des collectionneurs d'albums comme il existe des collectionneurs de tout ; et qu'il en était qui possédaient de véritables trésors qu'aucun musée ne renfermerait jamais. Trésors sans grande valeur marchande, sans doute, mais riches de leur seule mémoire et de l'empreinte qu'y ont laissée les générations d'enfants et d'adolescents qui les ont aimés et s'en sont nourris, quand bien peu de foyers possédaient une encyclopédie ou même le Larousse illustré en deux volumes où s'abîmer pendant les veillées d'hiver et les jours de mauvais temps !

 

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C'est qu'on y apprenait autre chose, force est de le reconnaître, que dans les vignettes Panini des équipes de « foutebol » ou celles de « starwar »...

On y apprenait par exemple qu'Aristote, en son temps, avait découvert dans la Méditerranée des poissons ruminants, pas moins ! Et l'une des images des chocolats Nestlé-Kolher nous les montre, dans sa série des « Merveilles du Monde ». Ce ruminant,  c'est le scare, appelé aussi « perroquet des mers » à cause de ses vives couleurs ; il n'a rien que de sympathique, et la légende de la vignette nous renseigne : « ... à cause de ses dents acérées, ce poisson coupe des plantes aquatiques dont il fait provision dans ses abajoues ; ce n'est que plus tard qu'il mangera cette nourriture en la mâchonnant préalablement à la manière de la vache. » Quant au rémora, long d'environ un mètre, on nous explique que les indigènes de l'Archipel sud australien s'en servent astucieusement comme ils le feraient d'un chien de chasse, ni plus ni moins qu'en le tenant en laisse et en le hâlant après qu'il ait saisi sa proie ! On  apprend de la même veine, que le tiers du corps du gymnote est constitué par un organe faisant office de pile électrique dont la tension de 800 à 900 volts peu bien nous électrocuter. Nous voilà fort bien renseigné, et voilà de quoi faire naître, sinon des vocations d'ichtyologues, du moins un intérêt certain pour les mystères de la faune marine.

Ouvrons « L'Europe », à la livrée parée de rouge du chocolat Pupier, au hasard d'une page; on y apprend que le « Prince de Saxe-Cobourg , Léopold 1er fut le premier roi de Belgique, après la Révolution de 1830 qui en fit un état indépendant. Veuf de la princesse Charlotte d'Angleterre, il épousa en 1832, la princesse Marie-Louise d'Orléans, fille aînée de Louis-Philippe. ». On y voit le palais de Monaco, un cuirassé de la marine anglaise, les hauts-fourneaux de Gelsenkirchen, Naples et le Vésuve, la bataille de Lépante, des soldats roumains, une vue d'Helsingfors, créée en 1642, capitale de la Finlande, ainsi que la carte de ce pays mystérieux avec ses nombreux lacs.

 

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On doit aux « Cafés Gilbert », qui possédaient deux usines, l'une à Paris, 136 rue Championnet et l'autre à Poitiers, boulevard Pont-Achard, de magnifiques séries thématiques sur les costumes traditionnels, les uniformes, les bateaux, l'agriculture, les chiens, les papillons, les oiseaux, les poissons... Thèmes repris pratiquement par tous les éditeurs avec plus ou moins de bonheur. Quant aux grands faits de l'histoire de France, nombreuses furent les publications à les illustrer au début du vingtième siècle.

 

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Beaucoup de ces albums, patiemment complétés, donnaient droit à un cadeau que je n'ai pour ma part jamais demandé, préférant les conserver intacts plutôt que de me les voir réexpédiés scarifiés par des « poinçonneurs » peu scrupuleux d'épargner les belles images !

A l'heure où ces dernières icônes d'une civilisation riche d'enseignement « populaire » brillent encore de leurs derniers feux dans les boutiques spécialisées, sur les tréteaux des « puces », ou s'échangent sur le net, rendons hommage à tous ceux qui les ont amoureusement conservés pour le bonheur des amateurs, et des collectionneurs d'aujourd'hui. Ils témoignent  d'un temps où tout était prétexte à se cultiver « honnêtement », dans l'acception d'un humanisme populaire disparu. Nous sommes un certain nombre à le regretter...

 

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(à suivre)

 

 

 

18/03/2010

18 MARS 1844

 

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18 mars 1844, naissance à Tikhvine de Nikolaï RIMSKY KORSAKOV