30/06/2010
BULLETIN CELINIEN
Bulletin célinien n° 320
Ce numéro accorde une place importante à la danse. On sait en effet tout l’intérêt que portait Céline à cet art et l’attrait qu’exerçait sur lui les danseuses : une attirance quasi biologique.
On y remarque l’article d’Henri GODARD : « Céline et la danse » ; il rapporte cet extrait de Bagatelle qui en dit long sur la passion célinienne pour les jambes des danseuses : « Dans une jambe de danseuse le monde, ses ondes, tous ses rythmes, ses folies, ses vœux sont inscrits !... jamais écrits !... Le plus nuancé poème du monde !... émouvant ! (…) Le poème inouï, chaud et fragile comme une jambe de danseuse en mouvant équilibre est en ligne, (…) aux écoutes du plus grand secret, c’est Dieu ! C’est Dieu lui-même ! Tout simplement ! (…) La vie les saisit, pures… les emporte… au moindre élan, je veux aller me perdre avec elles… toute la vie… frémissante, onduleuse… ».
N’était-ce point lui qui disait quelque part il me semble : « La véritable aristocratie humaine ce sont les jambes qui la confèrent, pas d’erreur ! »
Et Henri Godard a raison de noter ce que Céline admire particulièrement chez la danseuse : « Une lutte de chaque jour contre les effets que le temps fait subir au corps humain, en le soumettant toujours plus à la pesanteur et en ne lui faisant plus accomplir que des mouvements de moins en moins harmonieux… » et plus loin : « La danseuse est l’être humain qui mène avec le plus d’évidence contre cette mort avant la mort une action perdue d’avance mais glorieuse. »
Aussi n’est-ce point hasardeux qu’il ait écrit des « ballets » auxquels il tenait beaucoup, comme le rappelle Marc LAUDELOUT en rapportant ces mots d’un entretien de Céline avec Georges Conchon en 1958: « Je suis particulièrement fier de mes ballets. Autant mes livres, mon Dieu, je les trouve pas mal, mais les ballets, je les trouve très bien. »
Et curieusement, c’est dans Bagatelles que trois arguments de ballets trouveront leur place, comme s’il fallait « changer de piste », tourner le disque, apporter de la poésie dans un monde de brutes ; façon peut-être à l’auteur de se dédouaner, de montrer sa vraie nature de suggérer de quel côté il se trouve. C’est la question qu’on peut se poser et, à sa manière, l’éditorialiste ne manque pas de la soulever.
Il aura fallu attendre 1959 pour que Gallimard publie en tirage limité les « Ballets sans musique, sans personne, sans rien. » Illustrés par Eliane Bonabel, ils regroupent « La Naissance d’une fée », « Voyou Paul. Brave Virginie », « Van Bagaden », « Foudres et flèches » et « Scandale aux Abysses ». Robert POULET en rendit compte dans « Rivarol » du 30 juillet 1959. La lecture qu’il en fit est rapportée dans ce présent bulletin.
Outre deux pages réservées au courrier des lecteurs, on remarquera dans cette trois-cent vingtième livraison deux inédits rapportés par Marc LAUDELOUT : le premier concerne l’autodafé qu’aurait fait Allemagne hitlérienne du Voyage traduit en 1933 par Isak Grünberg ; il l’explique dans un article intitulé « Voyage au bout de la nuit brûlé par le IIIe Reich ? ». Le second, relate la participation de Céline le 5 mai 1938 à l’occasion de son séjour à Montréal, à l’assemblée du mouvement d’Adrien Arcand (1869-1967), le Parti National Social Chrétien. On le voit d’ailleurs, en première de couverture de ce bulletin, au milieu d’un groupe de fidèles. Cet article fort bien documenté et ses nombreuses notes très intéressantes montrent le soucis qu’avait Céline de préparer l’avenir, lui qui sentait monter la guerre comme le lait posé sur le feu : « Les partis de gauche qui mènent la France la poussent vers la guerre. (…) C’est déguelasse cette affaire. Encore la guerre. Deux fois en vingt ans, je le sais moi, ce que c’est, j’y suis allé, je suis mutilé. » Henri Béraud de son côté ne disait pas autre chose dans ses pamphlets…
C’est donc dans ce contexte surchauffé que l’auteur de Bagatelles songeait à l’exil outre atlantique : « Un seul espoir : le Canada. ». Sans doute, pour sa sécurité, eut-il mieux valu qu’il s’y rendît alors…
12:58 Publié dans notes de lecture | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
Sur les femmes, d'un admirateur de Céline :
http://lounesdarboisbeaumont.hautetfort.com/archive/2009/10/index.html
Écrit par : Boreas | 07/08/2010
Bon, pour ne chatouiller aucune susceptibilité, je précise qu'il s'agit de la frange urbaine, moderne, ahurie et sans coeur de la gent féminine.
Un joli pamphlet, torché à la va-vite, mais non sans talent, par un jeune homme qui en a, lui, du coeur.
A l'évidence.
Écrit par : Boreas | 07/08/2010
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